Avec cette opération, Erytech explore un nouveau domaine médical prometteur et apporte à Pherecydes ses ressources, notamment 41 précieux millions d’euros, pour consolider et étendre le portefeuille de produits de cette dernière en phagothérapie.
Née en 2006 à Nantes, Pherecydes Pharma développe des traitements antibactériens basés sur les bactériophages, des virus naturels capables de combattre les infections résistantes aux antibiotiques.
Cotée sur le Nasdaq et Euronext, Erytech développe quant à elle des thérapies innovantes basées sur les globules rouges pour lutter contre des cancers et des maladies orphelines. Sa plateforme propriétaire, Erycaps®, permet d’encapsuler des médicaments dans les globules rouges. La biotech a été fondée en 2004, à Lyon. C’est là que déménagera la future société, une fois la fusion entérinée.
Fin juin 2023, les résolutions d’approbation de l’opération devront obtenir, au niveau de chaque société, le vote positif des deux tiers des actionnaires présents ou représentés lors des assemblées générales. Les conseils d’administration ont déjà voté unanimement en faveur. Le nouveau nom et la nouvelle image de la société seront décidés à cette occasion, mais l’on sait déjà que Thibaut du Fayet, directeur général de Pherecydes, devrait devenir directeur général et Gil Beyen, directeur général d’Erytech, Vice-président du conseil d’administration du nouvel ensemble.
“Notre Conseil d’administration soutient pleinement cette opération et est convaincu qu’Erytech et Pherecydes vont combiner une expertise et des capacités essentielles permettant de dynamiser nos programmes de recherche, ainsi qu’une équipe de direction expérimentée et très complémentaire, et une position internationale ouvrant accès aux investisseurs et aux parties prenantes américaines. Tous ces atouts permettront également de conduire et d’accélérer le plan de développement clinique de Pherecydes avec des études internationales contrôlées et randomisées visant à établir les preuves de concept cliniques de la phagothérapie, permettant une réelle rupture dans le domaine anti-infectieux”, Thibaut du Fayet, Directeur Général de Pherecydes.
“Ce rapprochement entre Erytech et Pherecydes est très complémentaire. Il va permettre d’accélérer le développement de traitements dans le domaine de la résistance aux antibiotiques pour aider les patients, et répondre ainsi à un enjeu de santé mondial et un défi médical majeur. La phagothérapie est une approche prometteuse pour cibler les bactéries pathogènes telles que S. aureus, E. coli et P. aeruginosa qui, dans l’ensemble, sont responsables de plus de 800 000 infections résistantes par an aux États-Unis et en Europe”, Gil Beyen, Directeur Général de Erytech.
Dès l’annonce de la fusion envisagée, les cours en bourse des deux sociétés sont montés. “C’est bon signe, se réjouit Gil Beyen, Directeur Général de Erytech. Cela démontre que le marché juge cette fusion rationnelle, dans un domaine, l’antibiorésistance, aux besoins non-couverts énormes.” Environ 1,3 million personnes meurent chaque année dans le monde à cause de la résistance aux antibiotiques. On estime qu’elles seront 10 millions d’ici 2050.
Avec cette opération, Erytech prouve qu’elle s’est remise de la grande déception essuyée fin 2021, lorsque l’essai clinique de phase III mené sur son candidat-médicament, le Graspa, à base d’asparagynase encapsulée dans les globules rouges, se conclue par un échec, le produit n’étant pas assez puissant pour lutter efficacement contre le cancer du pancréas. “Cela a été un moment vraiment dur mais nous nous sommes immédiatement lancés dans une recherche stratégique pour assurer le futur d’Erytech, en se basant sur notre expertise en essai clinique, notre équipe scientifique et notre trésorerie”, explique Gil Beyen.
En plus d’une restructuration, la vente du site de production américain, à Princeton, dans le New Jersey, libère 44 millions de dollars pour un possible investissement. Après avoir rencontré une cinquantaine de biotechs, le choix se porte sur Pherecydes. Les technologies des deux sociétés présentent de potentielles synergies et peuvent s’allier. Gil Beyen estime qu’elles vont pouvoir“capitaliser sur (leurs) compétences mutuelles pour créer un leader mondial”. D’un côté, Erytech s’engage dans un domaine médical porteur, quand de l’autre, Pherecydes trouve les ressources financières qui lui manquaient et voit les portes de l’Amérique s’ouvrir à elle, Erytech étant déjà présente sur le sol et la bourse américaine. Aujourd’hui, la quinzaine de chercheurs d’Erytech va donc s’atteler avec enthousiasme à un nouveau domaine médical.
Le programme de la nouvelle entité pour 2023 et 2024 est déjà bien chargé. Dans un premier temps, le périmètre de l’étude de phase II PhagoDAIR, en cours chez des patients souffrant d’infections de prothèses articulaires du genou ou de la hanche dues au Staphylococcus aureus, va s’agrandir grâce à l’ouverture de nouveaux centres cliniques en Europe (résultats attendus au 1er trimestre 2024). Ce traitement pourrait bénéficier d’un accès précoce au marché en 2026.
En plus de PhagoDAIR, deux autres études de phase II vont être financées : l’une chez des patients atteints d’endocardites dues au S. aureus (début mi-2023), et la seconde chez des patients atteints d’infections urinaires complexes dues au Escherichia coli (E. coli) (1er trimestre 2024). La société prévoit d’ouvrir des centres cliniques aux États-Unis pour ces deux études.
Parallèlement, une partie plus réduite des chercheurs se concentrera sur l’étude des complémentarités entre phagothérapie et globules rouges, pour éventuellement mettre au point des synergies entre les deux technologies. Ils s’appuieront sur les plateformes et l’expertise d’Erytech, notamment les solutions d’administration de médicaments par des globules rouges (Erycaps) ou des vésicules dérivées de globules rouges (Erycev), mais aussi sur l’expertise de Pherecydes en matière de formulation et en oncologie pour soutenir les approches thérapeutiques à base de phages et d’endolysines dans des domaines anti-infectieux tels que l’antibiorésistance et au-delà, tels que l’alimentation, la cosmétique et la santé animale, ou le développement de nouveaux supports.
Deux nouveaux phages complémentaires vont par ailleurs venir compléter le portefeuille actuel de Pherecydes, s’ajoutant ainsi aux trois déjà existants (S. aureus, P. aeruginosa, E. Coli).