Biotechnologies
Convaincue que les biomédicaments vont révolutionner la santé de demain, la filière française soutenue par les pouvoirs publics s’engage pleinement pour faire de la France un champion de la bioproduction de médicaments. Depuis son lancement il y a deux ans, la stratégie d’accélération française en « biothérapie et bioproduction de thérapies innovantes » a permis à la France de se positionner en 2e position en termes de biothérapies en développement en Europe. En mobilisant l’ensemble des acteurs de la filière, les grands fleurons innovants comme les jeunes pousses visionnaires, et en agissant sur toute la chaîne de valeur, cette stratégie déployée à travers le plan Innovation Santé 2030, volet santé de France 2030, porte ses fruits.
Faire de la France un champion mondial de la bioproduction de médicament. Telle est l’ambition du gouvernement, accompagnée par France 2030 et Business France, pour soutenir le développement et la production en France de biothérapies.
D’un modèle historique fondé sur un produit unique, l’industrie pharmaceutique poursuit avec succès sa mue vers un modèle de médecine des 5 P (prédictive, préventive, personnalisée, participative et basée sur les preuves). Et pour ce faire, elle se fixe des objectifs d’envergure avec d’ici 2030 la production de 20 biomédicaments, l’émergence d’une licorne et de cinq ETI et le doublement du nombre d’emplois dans le secteur de la bioproduction.
A date, la filière compte déjà 2210 entreprises dont 820 biotech et 1393 medtech et l’écosystème compte 60 000 emplois directs et indirects sur le territoire selon le « Panorama France HealthTech 2023 ». « La filière des Healthtech françaises a atteint un nouveau niveau de maturité avec une part de plus en plus importante de sociétés présentes sur les marchés internationaux. Les effectifs de la filière sont également en croissance (+20 % d’emplois direct en deux ans) témoignant du dynamisme et de la vitalité du secteur », explique Chloé Evans, adjointe au directeur général en charge des études sectorielles et des relations institutionnelles de France Biotech.
Avec la santé numérique, les entreprises de biotechnologie représentent la part ayant le plus progressé en termes de produits commercialisés (ou plus bas dans la partie export). Ayant gagné en maturité et en croissance, les bio et medtech ont désormais en ligne de mire de leurs préoccupations leur déploiement à l’international, leur industrialisation (phase de scale up) et leurs besoins en financement et en accompagnement vis-à-vis des contraintes règlementaires, notamment européennes.
Le biomédicament, l’avenir de la santé
59 % des médicaments en développement dans le monde sont aujourd’hui des biothérapies. Quatre ans après la crise sanitaire mondiale du Covid, l’importance stratégique de l’innovation et de la souveraineté industrielle française comme européenne en matière d’industrie, de biothérapies et de bioproduction de nouvelles thérapies constitue un enjeu de premier plan, qui plus est dans un contexte européen marqué par un vieillissement de sa population. « Les HealthTech contribuent à la réindustrialisation de nos territoires, à l’emploi et la décarbonation, appuie le ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie, Roland Lescure.
Les biomédicaments ne se contentent pas d’enrichir notre arsenal thérapeutique existant mais ouvrent de nouveaux espoirs de traitement, représentant à ce titre un enjeu de santé publique majeur. En effet, les nouvelles technologies incubées et développées par les entrepreneurs de la HealthTech dans les domaines de la BioTech et de la MedTech transforment la prise en charge de nombreuses maladies, augurant une médecine du futur révolutionnaire pour les maladies rares, incurables ou en situation d’impasse thérapeutique. L’innovation technologique rend ainsi possible une personnalisation de l’approche thérapeutique.
L’utilisation thérapeutique de substances d’origine biologique, moléculaires (ADN, protéines dont anticorps) ou cellulaires et le développement des médicaments de thérapies innovantes (thérapie génique, thérapie cellulaire somatique, médicaments issus de l’ingénierie cellulaire) représente dès lors un formidable progrès au service des patients et contribue de facto à la soutenabilité du système de soin français.
Qu’est-ce qu’un biomédicament ? On entend par médicament biologique tout médicament dont le principe actif est issu du vivant (cellules de mammifère ou bactéries notamment). On les distingue des médicaments dont le principe actif est produit par synthèse chimique. Les biomédicaments se déclinent en trois catégories : les vaccins, les anticorps (protéines, peptides et biopolymères) et les médicaments de thérapies innovantes (MTI) qui regroupent les thérapies cellulaires et les thérapies géniques.
Un écosystème facilitant le développement de thérapies innovantes
La France dispose en 2024 d’un écosystème d’excellence regroupant tous les maillons de la chaîne de valeur du biomédicament. Ses infrastructures très développées, son organisation en clusters et pôles de compétitivité créant un tissu propice à l’innovation thérapeutique constituent un réel atout différenciant participant de l’attractivité de la filière. « La combinaison d’une recherche s’appuyant sur des infrastructures nationales de pointe avec une innovation portée par un riche tissu entrepreneurial, contribue à attirer et fédérer des acteurs de hauts potentiels sur notre territoire », pointe Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Les investissements majeurs ces dernières années qu’ont engagés les laboratoires français illustrent cette vitalité. Pour exemple, en 2020, Sanofi a ainsi investi 610 millions d’euros sur le bassin lyonnais qui visent à la fois la création d’un site de bioproduction de vaccins ainsi qu’un nouveau centre de recherche dédié aux vaccins. En vue de doter la France d’une chaîne de valeur complète et autonomie sur la technologie ARNm, le fleuron de l’industrie pharmaceutique française a annoncé deux ans plus tard un plan d’investissement massif de 935 millions d’euros de 2022 à 2026.
Pour renforcer la structuration de la filière et afin d’accélérer la mise sur le marché de nouvelles biothérapies et la faire rayonner en France comme à l’international, France Biolead, acteur national créé en décembre 2022 sous l’égide du Comité stratégique de filière des industries et technologies de santé (CSF-ITS) et soutenu par l’État à hauteur de 800 000 euros, fédère l’ensemble de la chaîne de valeur de la bioproduction de médicaments : la recherche académique, les acteurs de la formation, les industriels, les pôles de compétitivité et clusters, les associations et syndicats professionnels. L’écosystème français compte ainsi plus d’un millier de structures.
Dans ce paysage, deux régions sont historiquement motrices : l’Île-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes. Pour la ministre, « la valorisation et le transfert technologique des premiers résultats de la recherche biomédicale procèdent de notre capacité commune à les intégrer dans un continuum entre recherche, santé et industrie ». Afin de regrouper le soin, la recherche et l’innovation au sein de pôles d’excellence, le président de la République a ainsi annoncé l’an dernier 12 nouveaux IHU et quatre nouveaux bioclusters. « Ces succès, qui dotent notre pays de capacités de recherche d’un niveau mondial et qui établissent des partenariats stratégiques entre acteurs académiques et industriels, sont autant d’outils participant à l’accélération de l’accès aux innovations en santé. »
Depuis les annonces du plan France 2030, Fabien Rolet, directeur de Polepharma, premier cluster pharmaceutique européen, observe de son côté « un record d’investissements » sur ses sites industriels ainsi que « l’augmentation de capacités dans beaucoup d’usines, qu’elles appartiennent ou non à des grands groupes et le rapatriement de certaines productions. C’est une vraie politique d’attractivité et d’accueil en faveur de la production pharmaceutique qu’elle soit classique ou en biothérapie ».
Présidé par Philippe Ivanes, directeur du site de production de Sanofi Pasteur, ce cluster fédère 350 acteurs de la filière développement et production pharmaceutique jusqu’à la distribution, en passant par la formation, le packaging, les équipementiers et la chimie. Implanté dans les régions Centre, Normandie, Île-de-France et Nouvelle-Aquitaine, il représente un bassin de 70 000 emplois, 60 % de la production de médicaments en France et 25,3 milliards de chiffre d’affaires à l’export.

Source : Étude et caractérisation de la filière des biomédicaments en France, étude réalisée en 2023 par Mabdesign pour France 2030, l’Agence de l’innovation en santé et sa stratégie d’accélération Biomédicaments
et Bioproduction en thérapies innovantes, France Biotech et France Biolead.
Une industrie reconnue pour son savoir-faire et son excellence
Avec 363 biomédicaments uniques commercialisés et 584 en développement, positionnant l’Hexagone comme deuxième pipeline européen derrière le Royaume-Uni, la France occupe une position de choix dans la compétition mondiale comme le révèle l’étude réalisée en 2023 par Mabdesign pour l’Agence de l’innovation en santé (AIS), France BioLead et France BioTech. La France possède le deuxième pipeline de produits en phase de développement pré-clinique et le quatrième pour les produits en phase clinique. Elle développe 20 % des biomédicaments européens.
La filière a non seulement consolidé sa place de leader européen dans le domaine des maladies rares, mais a également relevé d’importants défis, notamment en matière de financement.
« Malgré un contexte macroéconomique difficile, l’écosystème a su démontrer sa capacité à innover et à se réinventer, attirant près de 1,8 milliard d’euros en levées de fonds », indique Franck Mouthon, l’ancien président de France Biotech
La France demeure le deuxième pays européen après le Royaume Uni en montants levés en capital-risque et nombre d’opérations en 2023. » Le soutien de partenaires clés tels que Bpifrance, qui a injecté près de 1,2 milliard d’euros en 2023, témoigne de la confiance en la vitalité et le potentiel de croissance de la HealthTech française. « Les exemples d’entreprises de la HealthTech qui passent « de la paillasse de laboratoire à l’usine » » sont nombreux. Le panorama des Healthtech publié l’an dernier montre ainsi une forte croissance des effectifs : + 18 % entre 2021 et 2023 ! », analyse Roland Lescure, ministre délégué en charge de l’industrie et de l’énergie.

Faisant ses preuves dans les domaines thérapeutiques phares que sont les maladies infectieuses, l’oncologie, la pathologie du métabolisme et l’immunologie, la qualité de la recherche scientifique et médicale attire les investissements industriels. La France est devenue la première destination en Europe pour la localisation des projets de santé ; il s’agit du premier secteur industriel pour les investisseurs étrangers en France.
Par ailleurs, le dynamisme de l’industrie pharmaceutique française est visible à travers son important réseau d’exportation, dont Business France travaille à accompagner le développement. Une entreprise sur cinq possède au moins une filiale à l’étranger et 50 % des bio et medtech de plus de dix ans sont présents à l’international. Le médicament est ainsi l’un des quatre secteurs manufacturiers qui contribue positivement à la balance commerciale. Le continent européen figure en tête des implantations à l’international des entreprises françaises bien que les Etats-Unis demeurent l’un des marchés privilégiés. Plus précisément, si les Etats-Unis sont, compte tenu de la taille de son marché, le premier pays ciblé par les sociétés de HealthTech françaises qui y concentrent un tiers de leurs filiales (42%), le continent européen et notamment les marchés les plus grands, structurés et matures que sont le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne et la Belgique, demeurent très attractif pour ces dernières progressant de 5 points par rapport à 2022 (43%).

Un soutien massif des pouvoirs publics
Cette excellence française et l’accélération de la stratégie d’innovation industrielle doivent beaucoup à un soutien fort financier des pouvoirs publics et à une stratégie offensive menée à 360 degrés. De la recherche en amont jusqu’à sa bioproduction sur le territoire et son rayonnement à l’international, c’est plus de 19 actions sur 21 dans le cadre de la stratégie France 2030 qui ont d’ores et déjà été engagées ces deux dernières années pour agir à toutes les étapes du développement d’une biothérapie. Au travers du plan Innovation Santé 2030, ce ne sont pas moins de 86 projets qui ont été financés avec la participation de plus de 250 partenaires à travers le territoire, représentant un investissement public de 338 millions d’euros. Cette stratégie permet de transformer activement la recherche en réalité industrielle et de soin pour les patients.
Pour catalyser l’innovation et former aux compétences de bioproduction, un programme de recherche dédié copiloté par le CEA et l’Inserm a été lancé en décembre 2023 à Nantes. Doté de 80 millions d’euros de France 2030, le programme a déjà permis de financer et lancer 12 projets auxquels plus de 50 laboratoires sont associés. En parallèle, plus d’un million d’euros a été engagé pour permettre le transfert de technologies, de la recherche vers le monde économique et clinique. Afin de développer des biothérapies innovantes en santé humaine, 46 projets ont également été financés dans les domaines clés du cancer, des maladies rares et de la neurologie.
Du côté de l’outil industriel, maillon essentiel pour permettre aux entreprises innovantes un passage à l’échelle et à la production, les acteurs pharmaceutiques peuvent s’appuyer sur les dispositifs « Innovations en biothérapies et bioproduction » ou bien encore « Industrialisation et Capacités Santé ». Pour exemple, huit projets lauréats d’industrialisation ont été financés à hauteur de 50 millions d’euros. La mise en place de l’Agence de l’innovation en santé (AIS) en novembre 2022 et l’accompagnement personnalisé de sept entreprises de la stratégie d’accélération « Biothérapies et bioproduction » dans le cadre du dispositif FrenchTech 2030 a, entre autres dispositifs, permis de lever des verrous en matière d’accès au marché. « Nous concentrons tous nos efforts pour soutenir la réindustrialisation du pays qui est une tendance de fond et qui prend une place de plus en plus structurante dans l’écosystème de la santé avec France 2030. Nous sommes en train de déployer ce volet qui va se traduire par la sortie de terre de nouvelles usines et l’arrivée de nouvelles molécules sur le marché », détaille Paul-François Fournier, directeur exécutif Innovation de Bpifrance.
A travers le plan Innovation Santé 2030, « la France est en voie de devenir un acteur majeur des biomédicaments et de leur production » souligne l’AIS dans son étude en 2023. A deux ans du lancement de la stratégie d’accélération, la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la filière BioTech et MedTech porte ses fruits, que ce soit pour maintenir la France en tant que leader en assurant un flux d’innovations issues de la recherche académique, pour accélérer les projets de développement tout en garantissant l’industrialisation sur le territoire ou bien encore pour garantir la quantité et la qualité des biomédicaments à des coûts maîtrisés pour le système de santé.
Pour l’AIS, il appartient désormais de « poursuivre la politique de structuration engagée afin de rendre la filière toujours plus compétitive et attractive à l’international, et ainsi garantir aux patients l’accès aux meilleurs traitements. »
France 2030, une double ambition
Transformer durablement des secteurs clés de l’économie française (énergie, automobile, santé, aéronautique, espace) par l’innovation technologique et industrielle et positionner la France non pas seulement en acteur, mais bien en leader du monde de demain. De la recherche fondamentale, à l’émergence d’une idée jusqu’à la production d’un produit ou service nouveau, France 2030 soutient tout le cycle de vie de l’innovation jusqu’à son industrialisation.